Je viens de lire cet article paru aujourd'hui dans la presse suisse. Le retour des femmes au foyer
La place des mamans est à la maison: c'est ce qui ressort d'une enquête réalisée auprès de citoyens suisses, et qui est largement partagé par les hommes, les Romands et les jeunesAménager des crèches pour permettre le travail des femmes, c'est le credo politique à la mode. Mais pour la population, la place des mères est à la maison! Pour la majorité des 6660 citoyens interrogés par le Panel suisse des ménages (PSM), un enfant en âge préscolaire souffre du fait que sa mère travaille. Cette opinion est partagée par six hommes sur dix et quatre femmes sur dix. Et les jeunes pensent comme leurs aînés.
Papa au bureau et maman au fourneau: les Romands sont plus réactionnaires que les Alémaniques. Mais si ce sondage est explosif chez nos voisins, c'est qu'il donne de l'eau au moulin d'une ancienne animatrice de télévision allemande. Dans un pamphlet intitulé «Das Eva-Prinzip», Eva Herman a provoqué un raffut en prétendant que de nombreuses femmes sacrifient leurs enfants à leur carrière.
Le débat est relancé, puisque les jeunes mamans rechignent à concilier travail et enfants. Un double emploi qui n'est pas toujours choisi, mais imposé par le budget du ménage. La moitié des femmes de moins de 40 ans considère que les enfants souffrent de l'absence de leur mère, contre un tiers qui ne constate aucun effet négatif. Au-delà de 60 ans, elles ne sont plus qu'une sur cinq à nier toute mauvaise incidence. Faut-il prendre de nouvelles mesures pour favoriser l'égalité des sexes devant le travail? La réponse et non et même la moitié des femmes radicales s'y oppose.
Ce sont surtout les partisans de l'UDC qui renvoient les femmes au foyer. Les agrariens sont 70% à penser que les enfants en âge préscolaire pâtissent du travail des femmes, contre 15% d'avis contraire. Radicaux et démocrates-chrétiens partagent cette conclusion à presque deux contre un. A gauche, les socialistes sont partagés et chez les écologistes, 38% suivent cette tendance et 47% la désavouent. Mais ces chiffres trahissent une vérité: les hommes de gauche ne partagent pas l'avis de leurs édiles!
Ces statistiques sont issues de l'enquête «Vivre en Suisse» menée depuis 1999 et subventionnée par le Fonds national de la recherche scientifique. Les réactions politiques tombent après leur publication dans Blick. A droite, les femmes politiques déplorent le manque affectif qui touche l'enfant privé de sa mère: «Une baisse des impôts permettrait à un parent de rester à la maison», suggère la conseillère nationale Jasmin Hutter (SG/UDC). A gauche, elles revendiquent des structures d'accueil, en arguant que les enfants aiment jouer ensemble: «Crèches, ouvrez vos portes», s'exclame la conseillère nationale Jacqueline Fehr (ZH/PS).
«Le père est tout aussi capable»«Je suis certain que les enfants souffrent si un des parents n'est pas à la maison, mais pourquoi la mère et pas le père?» s'interroge le conseiller national jurassien Pierre Kohler (43 ans). Ce parlementaire démocrate-chrétien renonce à un nouveau mandat politique pour favoriser l'épanouissement professionnel de son épouse Geneviève, devenue directrice d'école. C'est lui qui prend en charge Loriane (12 ans) et Orélian (7 ans).
Selon lui, la question du panel est biaisée: «Demander si un enfant souffre du fait que sa mère travaille, c'est sous-entendre que le père est absent, ce qui n'est pas forcément le cas», poursuit Pierre Kohler. A ses yeux, la présence de la mère s'impose pour l'allaitement: «C'est le principe de l'assurance-maternité.» Mais après les premiers mois, «un père est tout aussi capable d'éduquer un enfant».
A contrario, «les enfants ne sont pas à l'aise si leur maman n'est pas épanouie», argumente ce père très heureux au foyer. Pierre et Geneviève Kohler s'efforceront de passer leur week-end en famille. «Ce qui déstructure la famille, c'est le travail le dimanche», conclut l'avocat delémontain.
«Ma femme a arrêté de travailler»«Jusqu'à 8 à 9 ans, la présence d'une mère est primordiale. Ou évidemment celle du père. Sinon l'enfant est ballotté: il a une nounou, puis une autre personne à la crèche. La personne de référence change tout le temps et l'enfant ne peut développer de relation émotionnelle stable. Et il existe une facture sociale à payer plus tard. Ma femme a arrêté de travailler et j'ai eu la chance avec mon métier d'enseignant de pouvoir rentrer tôt et profiter de mes enfants.»
Oskar Freysinger, conseiller national (UDC/VS), père de trois enfants (12, 15 et 17 ans)«C'est le nouveau trend!»«Je ne suis pas du tout surprise par le résultat de ce sondage. Le retour vers d'anciennes valeurs, c'est un nouveau trend, surtout chez les jeunes. Moi, quand j'étais petite, j'avais ma maman à la maison. Pour moi ce n'est pas indispensable. Je ne pense pas que l'enfant souffre pour autant. L'important, c'est juste qu'il ne reste pas tout seul devant la télé!»
Valérie Garbani, conseillère nationale (PS/NE), sans enfants
«Un résultat choquant!»«Les résultats de cette étude sont choquants. C'est un retour vers de vieilles valeurs morales. Et pourquoi ne pas demander aux enfants s'ils souffrent de l'absence du père? Il faut trouver un équilibre dans le couple et c'est très difficile. L'important pour l'enfant, ce n'est pas le nombre d'heures mais la qualité des moments passés ensemble. J'ai demandé à mes enfants s'ils me voulaient à la maison. Ils ont évidemment répondu oui. Mais il est aussi important qu'ils aient une mère épanouie. Il existe par contre des moments où il faut absolument être là. J'ai pris congé cette fin de semaine pour assister aux promotions.»
Esther Mamarbachi, journaliste, deux enfants (10 et 6 ans)
«On n'a pas toujours le choix»«Je ne suis pas surprise par ce résultat. Il est normal qu'on s'occupe des enfants. C'est instinctif! On n'en fait pas pour les mettre à la garderie. On aimerait tous s'occuper d'eux. En attendant, nous n'aurions rien eu à manger avec mon fils, si je n'avais pas travaillé. Il faudrait que chaque femme puisse décider si elle a envie de travailler. Ensuite à elle d'assumer. Malheureusement dans la vie, on n'a pas toujours le choix.»
Lolita Morena, animatrice télé, un enfant de 15 ans«Il faut des temps partiels»
«La question du sondage est mal posée. Pourquoi ne parle-t-on pas du père? Les résultats reflètent cependant bien la problématique. Il y a des enfants qui en souffrent et d'autres qui s'en sortent très bien. Le retour de la femme au foyer n'est pas la solution. Il faudrait plutôt pouvoir aménager le temps de travail et permettre plus de temps partiel. Moi, par exemple, je ne sais pas où mettre un bébé dans une vie hyperactive.»
Isabelle Chevalley, présidente d'écologie libérale, sans enfantsSource : lematin.ch par Vincent Donzé - 28/06/2007